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Ordres de priorité du Code civil du Québec

Chacune des priorités énoncées à l’article 2651 du Code civil du Québec est reprise ci-dessous, accompagnée des explications pertinentes ainsi que de leurs incidences respectives dans le travail du courtier.

Frais de justice

Ces frais peuvent être exécutés autant sur les biens meubles que sur les biens immeubles du débiteur1. On parle ici des frais et des dépenses engagés pour faire la saisie et la vente des biens, des frais d’huissier et des frais de procédures judiciaires.

On pourrait également inclure les frais d’électricité ou d’entreposage dans un cas, par exemple, où il faudrait garder des aliments au froid afin de les conserver.

Ce type de priorité est opposable uniquement envers les créanciers du débiteur, ce qui a comme effet de restreindre l’étendue de l’opposabilité de cette créance prioritaire. Cette priorité n’est donc pas opposable envers les tiers en général.

Concrètement, dans la mesure où le débiteur vend son immeuble, la priorité ne pourra être exercée par le créancier sur cet immeuble. Le créancier peut toujours exercer son recours contre les autres biens meubles ou immeubles du débiteur, mais la priorité ne sera pas opposable au nouveau propriétaire qui vient d’acquérir l’immeuble.

Nonobstant ce qui précède, tant et aussi longtemps que l’immeuble n’est pas vendu, une telle priorité pourrait avoir une incidence sur le travail du courtier puisqu’elle peut affecter des biens immeubles. Un créancier pourrait exercer son recours prioritaire contre l’immeuble à vendre, et ce, avant la réalisation du contrat de courtage. Il est donc important que le client vendeur fasse part de cette éventualité afin que le courtier qui le représente adapte la mise en marché en conséquence.
 


1 Art. 2652 C.c.Q.

 

DEVOIRS ET OBLIGATIONS DU COURTIER

Lorsqu'il y a une priorité d'hypothèque, le courtier doit l'indiquer au contrat de courtage vente et s’assurer que cette information se retrouve sur les documents contractuels d’achat, soit à la clause 4.3 du contrat de courtage, à la clause 10.4 du formulaire Promesse d’achat, dans le formulaire Contre-proposition à une promesse d’achat ainsi que dans la fiche descriptive.

Au formulaire Déclarations du vendeur sur l’immeuble, le courtier coche en conséquence la section D2.8 et apporte les précisions requises à D15. Pour une copropriété divise, on utilise la clause D12.2 du formulaire Déclarations du vendeur sur l’immeuble – Copropriété divise (DVD).

Inscrire cette information aux formulaires est d’autant plus important que le type de priorité n’apparaît pas au Registre foncier malgré la présence des hypothèques légales enregistrées. Ainsi, seul le client (et son créancier) a connaissance des priorités et peut en faire part au courtier qui le représente.

Le courtier doit conserver une copie des documents pertinents dans son dossier.

 

Créance du vendeur impayé

Il est question ici du vendeur qui, dans le cadre de l’activité de son entreprise, vend un bien meuble à une personne physique – un consommateur – qui n’exploite pas une entreprise.

Exemple : un marchand de meubles vend un réfrigérateur à Josée pour son usage personnel. Josée se fait livrer son réfrigérateur la semaine suivante, mais bénéficie d’un terme pour en payer le prix d’achat. S’il y a une vente en justice des biens de Josée, le marchand de meubles pourra se prévaloir de sa créance prioritaire et exiger le produit de la vente de ce réfrigérateur, et ce, prioritairement à tous les autres créanciers.

Ainsi, cette priorité de second rang ne s’applique pas aux immeubles et aura donc très peu d’incidence dans le travail du courtier. Cependant, si le vendeur veut inclure certains biens meubles dans le cadre de la vente immobilière et que ces meubles ne sont pas entièrement payés, cela pourrait avoir des répercussions sur la vente.

Créances de ceux qui ont un droit de rétention sur un meuble

Ce type de priorité de troisième rang constitue une sûreté réelle. Cette priorité est accordée par le Code civil du Québec à certains créanciers qui doivent conserver un bien meuble qui leur a été remis – afin d’exécuter leur prestation de service, par exemple – et ce, jusqu’à ce qu’on leur paie les sommes convenues au contrat.

Une entreprise exerce un droit de rétention sur un bien lorsque pour exécuter son service elle doit avoir le bien en sa possession.

Exemple : pour exécuter son engagement contractuel, une entreprise de transport, de déménagement ou d’entreposage doit temporairement être en possession des biens meubles à transporter.

Autre exemple : un garagiste fait une réparation sur l’automobile de Claude. Tant que le garage ne sera pas payé, il pourra conserver l’automobile de Claude.

Seuls les meubles sont assujettis à cette priorité. Conséquemment, cette catégorie de priorité aura très peu d’incidence sur le travail du courtier, sauf dans le cas d’une transaction impliquant la vente d’une entreprise.

Créances de l’État

Les créances de l’État considérées par la loi comme étant prioritaires sont restreintes et ne comprennent que les impôts provincial et fédéral sur le revenu, les déductions à la source, la TPS et la TVQ. Elles constituent une priorité de quatrième rang.

Ce type de créance prioritaire ne vise que les biens meubles et non les biens immeubles2. Conséquemment, cette catégorie de priorité aura très peu d’incidence sur une transaction immobilière.
 


2 Art. 2653 C.c.Q.
 

Cas des créances des municipalités et des commissions scolaires pour les impôts fonciers

On fait référence ici aux droits de mutation sur les immeubles (mieux connus sous le nom de taxe de bienvenue), aux taxes municipales et aux taxes scolaires.

L’article 2654.1 du Code civil du Québec indique que :

« Les créances prioritaires des municipalités et des commissions scolaires pour les impôts fonciers sont constitutives d’un droit réel. Elles confèrent à leur titulaire le droit de suivre les biens qui y sont assujettis en quelques mains qu’ils soient. »

Le montant du droit de mutation immobilière qui doit être payé par l’acquéreur de l’immeuble se calcule en deux étapes.

On doit d’abord déterminer la base d’imposition du droit de mutation de l’immeuble. Il s’agit du montant le plus élevé parmi les trois montants suivants :

  • le prix payé pour l’acquisition de l’immeuble, soit le prix d’achat (n’incluant pas la TPS ni la TVQ);
  • le montant de la contrepartie inscrite à l’acte de vente (par exemple, le prix de vente total moins la valeur des meubles);
  • la valeur de l’immeuble inscrite au rôle d’évaluation multipliée par le facteur comparatif pour tenir compte de la valeur marchande réelle de l’immeuble. Il ne faut pas se fier uniquement au facteur comparatif apparaissant au compte de taxes puisqu’il peut différer de celui indiqué au rôle d’évaluation. En effet, le compte de taxes ne reflète que le facteur comparatif établi pour le premier exercice financier auquel le rôle s’applique. Il se peut que le facteur comparatif soit modifié subséquemment pour les exercices financiers suivants.
     

! BON À SAVOIR

Comme mentionné à l’article 2.1 de la Loi concernant les droits sur les mutations immobilières, les tranches d’imposition sont augmentées chaque année selon l’indice des prix à la consommation pour le Québec.


Cette catégorie de priorité ne vise que les immeubles, et contrairement aux quatre autres types de créances prioritaires, elle confère un droit de suite au créancier. Elle aura donc une incidence sur la transaction immobilière. Ces créances sont opposables aux autres créanciers ainsi qu’à tous les tiers lorsqu’elles sont constitutives d’un droit réel, sans qu’il soit nécessaire de les publier3. Elles représentent l’exception à la règle.

C’est pourquoi le notaire qui procède à la vente d’un immeuble vérifiera auprès de la municipalité; si des arrérages sont présents, il s’assurera de faire le paiement à même le montant de la vente.
 


3 Art. 2655 C.c.Q.

 

DEVOIRS ET OBLIGATIONS DU COURTIER

Exactitude et vérification des renseignements

  • Le courtier doit vérifier le montant des taxes municipales et scolaires en obtenant, entre autres, une copie de ces comptes auprès du propriétaire (ou via le site Internet de la ville et celui du centre de services scolaire).
  • Il conserve à son dossier une copie des documents qui lui ont permis d’effectuer ses vérifications.
  • Il se doit de mettre à jour les montants indiqués sur les fiches descriptives, particulièrement lorsque la durée du contrat de courtage chevauche deux années civiles.
  • Il doit aussi vérifier s’il n’y a pas de montants à payer pour les infrastructures. Dans le cas où le prix de vente dégage peu d’équité, un montant élevé d’arrérages de taxes foncières pourrait avoir une incidence sur la possibilité de retenir la rétribution du courtier à même le prix de vente.

Le courtier immobilier doit veiller à ce que les droits et obligations des parties à une transaction soient consignés par écrit et qu’ils reflètent adéquatement leur volonté. Il doit également toujours être en mesure de démontrer l’exactitude des renseignements qu’il fournit au public ou à un autre titulaire de permis.

Ce principe de vérification des renseignements doit être respecté tout au long du processus d'achat ou de vente, puisque la responsabilité de l’agence ou du courtier est engagée dès qu’il affirme, publie ou permet que des informations soient transmises au public. Nous insistons donc sur l’importance d’obtenir les informations immobilières de la meilleure source disponible. Or, puisqu’il existe plusieurs outils de recherche en ligne, nous vous rappelons que l’index des immeubles du Registre foncier demeure la source d’information que vous devez utiliser notamment pour identifier les propriétaires, les créanciers, ainsi que tous les droits et limitations grevant un immeuble.

Pour plus d’information, consultez l’article Exactitude et vérification des renseignements.

 

Dernière mise à jour : 18 décembre 2023
Numéro de référence : 266036